Thierry Meyssan

journaliste et militant politique français

Thierry Meyssan, né le à Talence (Gironde), est un écrivain français, président-fondateur du Réseau Voltaire. Il s'est fait connaître dans les années 2000 comme l'un des principaux diffuseurs des théories du complot sur les attentats du 11 septembre 2001. Il est aujourd'hui installé au Moyen-Orient, où il est proche du Hezbollah ainsi que des gouvernements iranien[1] et syrien.

Thierry Meyssan
Thierry Meyssan en 2005
Fonction
Président
Réseau Voltaire
Biographie
Naissance
Voir et modifier les données sur Wikidata (66 ans)
TalenceVoir et modifier les données sur Wikidata
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Enfant
Raphaël Meyssan (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
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Œuvres principales

Biographie

Thierry Meyssan est le petit-fils du colonel Pierre Gaïsset, observateur militaire de l'ONU et président de la Commission d'armistice Israël-Liban[2]. Il est le fils de Michel Meyssan, ancien conseiller municipal de Bordeaux et proche de Jacques Chaban-Delmas.

Élevé dans le milieu de la bourgeoisie bordelaise catholique (sa mère dirigeait les œuvres interdiocésaines de la région Aquitaine)[3], il milite dans sa jeunesse dans le mouvement chrétien du Renouveau charismatique[4] et manifeste un vif intérêt pour les questions religieuses au point de suivre des études de théologie au séminaire d'Orléans. Une photo publiée sur le tard (en 1986) dans le magazine catholique La Vie, le montre au milieu d'une foule de fidèles rassemblés devant le balcon du pape (Paul VI à l'époque) à la Pentecôte 1975[5].

Dans les années 1980, il s'affirme homosexuel et libre-penseur, tournant le dos à son éducation catholique. Il se sépare de son épouse, avec laquelle il s'était marié en 1976. Le mariage religieux est reconnu nul par le Vatican en 1990, au terme d'une longue enquête[5],[6],[7].

Il est le père de Raphaël Meyssan, illustrateur, auteur d'un roman graphique en trois tomes, Les Damnés de la Commune. Il diffuse les mêmes convictions politiques que son père[8].

En 2012, Thierry Meyssan s'exile en Syrie[9].

Engagement associatif et politique

1989-2002 : Projet Ornicar et lutte contre l'extrême-droite

En 1989, Thierry Meyssan crée le projet Ornicar, destiné à « lutter contre les discriminations fondées sur la sexualité »[10]. Cette association participe à la rédaction du rapport Roth au Parlement européen[11], négocie avec des organisations intergouvernementales le statut des fonctionnaires internationaux gays et lesbiennes[12], et fait inscrire la dépénalisation de l'homosexualité au sommet de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (CSCE).

Thierry Meyssan devient rédacteur en chef du mensuel d’information internationale Maintenant en 1994. En , il fonde le Réseau Voltaire, dont l'objectif déclaré est la « défense de la liberté d'expression et de la laïcité »[13]. Cette association publie des enquêtes remarquées sur l'extrême droite[14] (en particulier sur le service d'ordre du Front national, qui mène à une enquête parlementaire).

À partir de 1994, il est également secrétaire national du Parti radical de gauche (PRG)[15],[16],[17]. De 1996 à 1999, il est coordinateur suppléant du Comité national de vigilance contre l'extrême droite, créé à l'initiative du PRG, qui rassemble chaque semaine les 45 principaux partis politiques, syndicats et associations de gauche pour élaborer une réponse commune face à la montée de l'intolérance[18].

Selon Gilles Alfonsi, militant du Parti communiste français et membre du Réseau Voltaire à cette époque, Thierry Meyssan était alors « franc-maçon, membre du Grand Orient de France », d'où il tirait une partie de sa légitimité[19]. En 1996, le Réseau Voltaire lui-même est décrit par Le Monde comme « un collectif de la mouvance franc-maçonne, qui "défend les libertés collectives et individuelles" »[20].

Selon Alfonsi, le Réseau à l'époque « était approvisionné en informations par ses enquêtes propres et par des contacts – dont le président avait le monopole – au sein des ministères et des services de renseignement. »[19] Meyssan était notamment en lien avec les Renseignements généraux, dont le directeur Yves Bertrand déclare dans ses carnets s'être « appuyé sur Thierry Meyssan et son réseau Voltaire pour faire passer quelques torpilles. »[21]

2002 : L'Effroyable Imposture

En , quelques mois après les attentats du , Thierry Meyssan publie le livre L'Effroyable Imposture, dans lequel il attribue leur responsabilité à « une faction du complexe militaro-industriel » des États-Unis. La publication du livre suscite un tollé dans la presse : dans un article du , le journal Libération qualifie Thierry Meyssan de négationniste[22] ; le , dans un article intitulé Délires en ligne, le journal Impact Médecine le qualifie de révisionniste[23].

Dans leur enquête consacrée aux coulisses de l'ouvrage, Guillaume Dasquié et Jean Guisnel identifient une source importante de Thierry Meyssan en la personne d'Hubert Marty-Vrayance, membre des RG[24]. Celui-ci, longtemps proche d'Yves Bertrand, est décrit par plusieurs sources comme « sulfureux », « intenable », voire une « brebis galeuse » des services, et mis à l'écart en [25],[26],[27]. Yves Bertrand lui-même le qualifie de « maniaque de la conspiration »[27].

Chroniqué dans la presse étrangère et épuisé en France dès sa première semaine de publication, L'Effroyable Imposture touche un plus large public à partir de l'invitation de Thierry Meyssan à l'émission Tout le monde en parle de Thierry Ardisson[14]. En , le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) écrit à France Télévisions pour reprocher l'absence de recul critique des présentateurs lors du passage de Thierry Meyssan dans l'émission[28]. Copie de cette lettre est adressée à tous les médias audiovisuels sous convention. Depuis lors, Meyssan n'est plus invité sur les chaînes françaises.

Thierry Meyssan mène campagne pour que l'Assemblée générale de l'ONU ouvre une enquête internationale sur les attentats[29], sans y parvenir. L'entreprise reçoit peu de soutien, en dehors de celui de la Ligue arabe et du Conseil de coopération du Golfe[30],[7].

En , Thierry Meyssan est déclaré persona non grata sur le territoire des États-Unis par le ministère de la Défense américain[31]. Selon une statistique du ministère de la Sécurité intérieure, datée de 2005, plus de 3 000 ouvrages ont été publiés dans le monde pour ou contre les assertions de Meyssan[32],[7].

Engagement « anti-impérialiste »

Selon Christophe Bourseiller, à partir de la guerre du Kosovo en 1999 « le Réseau Voltaire se transforme aussitôt en un outil de propagande anti-OTAN. Il édite ainsi un journal électronique quotidien qui diffuse les informations venues du côté serbe. Dès lors, l’antiaméricanisme l’emporte sur l’antifascisme[33][source insuffisante]. En , Thierry Meyssan préside le colloque Axis for Peace, se présentant comme une réunion de diplomates, politiques, journalistes, venus débattre de la situation internationale et appeler à une mobilisation populaire internationale « en faveur du droit international et de la paix dans le monde » contre le courant néo-conservateur et l'impérialisme américain. La réunion rassemble environ 150 personnes venant de 37 pays.

Durant la guerre de l'été 2006, Thierry Meyssan se rend au Liban avec un groupe international[34] comprenant Dieudonné et Alain Soral. Le transit via la Syrie est organisé par Frédéric Chatillon, ex-responsable du GUD[35].

Se présentant comme un radical, il déclare être prêt « à travailler avec tout le monde, à l’exception de ceux qui ont participé activement aux agressions impérialistes » et s'inspirer de Jean Moulin, qui « accepta de travailler avec tous ceux qui voulaient défendre la liberté, de l’extrême gauche à l’extrême droite ». Il déclare se sentir proche du Hezbollah en tant que principal réseau de résistance au Proche-Orient et éprouver beaucoup d’admiration pour son secrétaire général Hassan Nasrallah. Il met également en avant sa « contribution personnelle » à la révolution iranienne et ses « amitiés vénézuéliennes ».[source secondaire nécessaire]

Au cours de l'année 2007, Thierry Meyssan s'exprime sur les chaînes de télévision de nombreux pays : Al Dounia TV (Syrie), Al-Alam (Iran), Al Jazeera (Qatar), Al-Manar (Liban), Dubai TV (Émirats), GTRK (Kazakhstan), IRIB (Iran), KTR (Kirghizistan), New TV (Liban), NBN (Liban), PMR (Transnistrie), Russia Today (Russie), Sahar (Iran), SSC (Syrie), Telesur (Amérique latine), TSV (Transnistrie), Venezolana de Televisión (Venezuela). Certaines jouent le rôle d'officines de propagande officielle.

En , il publie une étude sur « l'offensive israélienne contre le Liban, en , et le remodelage du Grand Moyen-Orient », sous le titre L'Effroyable Imposture 2. L'ouvrage est d'abord diffusé en version arabe au Liban et en Syrie. En France, le livre est édité par une société spécialement créée par le groupe Alphée de Jean-Paul Bertrand et diffusé par la Sodis d'Antoine Gallimard. Pour Al-Manar, la chaîne de télévision du Hezbollah : « Tout homme politique libanais devrait avoir lu et médité L'Effroyable Imposture 2 avant de s'exprimer »[36].

Thierry Meyssan décide de vivre au Liban en .

Le , il participe à une soirée spéciale consacrée aux attentats du par la chaîne russe ORT, pour un débat suivant la diffusion du film Zéro enquête sur le de l'eurodéputé italien Giulietto Chiesa[37]. A cette occasion, la première chaîne de télévision russe le présente comme « le principal dissident occidental » et insiste sur son exil[38].

Par la suite, Thierry Meyssan travaille pour le magazine russe Profil[39] et collabore à la chaîne de télévision libanaise al-Manar (chaîne du Hezbollah) et à des chaînes de radio et de télévision iraniennes[40],[41].

Le , Dieudonné annonce au journal Le Monde que Thierry Meyssan sera probablement son colistier pour les élections européennes. Meyssan n'a jamais répondu publiquement à cet appel. Il n'est, en fin de compte, pas présent sur la liste ; au demeurant, il ne réunissait pas les conditions d'éligibilité du fait de sa domiciliation hors de l'Union européenne[42],[43].

En 2010, Thierry Meyssan signe la pétition de Paul-Éric Blanrue pour l'abrogation de la loi Gayssot[44].

Conflits libyen et syrien de 2011

Lors de l'Intervention militaire de 2011 en Libye, Thierry Meyssan prend le parti du colonel Kadhafi et se rend à Tripoli pour soutenir le régime de ce dernier[45] ; il écrit à l'époque ne pas croire « que Tripoli puisse tomber » ni « que le colonel Kadhafi soit menacé », tout en accusant les journalistes occidentaux d'espionnage. Fin août, il doit fuir la Libye à la chute de Kadhafi[46].

Thierry Meyssan défend également le gouvernement syrien pendant la guerre civile syrienne. Il déclare notamment :

« Si ces observateurs [les observateurs de la Ligue arabe] font leur travail normalement, ils vont constater ce que le gouvernement syrien dit depuis longtemps et ce que toutes les personnes neutres qui se sont rendues sur place ont pu constater, qu'il y a un système de déstabilisation du pays avec des bandes armées qui viennent de l’extérieur, une guerre non conventionnelle qui est déjà effective, menée par des puissances occidentales dans ce pays, et qu'il n'y a pas du tout de soulèvement de masse et de répression. »

Ainsi Thierry Meyssan qualifie de « Contras » les opposants au président Bachar el-Assad, en référence aux « contre-révolutionnaires » du Nicaragua, financés par la CIA, dans les années 1980[47].

Thierry Meyssan joue son propre personnage dans un film de Mohammedreza Eslamloo, La Boîte noire du . Le film tourné en anglais est présenté en version persane en Iran au 29e Festival du film de Fajr (). Ce long métrage est un des cinq films représentant l'Iran au Marché du film organisé en marge du 64e Festival de Cannes ()[48],[49].

En 2012, il s'installe à Damas, au prétexte de devoir s'exiler pour fuir de prétendues « tentatives d’assassinat du gouvernement français »[9].

En 2013, Le Point souligne les liens étroits de Meyssan, désormais installé en Syrie, avec le gouvernement d'Assad, et le présente comme « conseiller particulier » du président syrien, dont il relaie la propagande de guerre[50].

Déclarations diverses

  • Dans un livre paru en Italie en 2007[51] et dans un entretien paru en , Thierry Meyssan affirme que le département de la Défense des États-Unis aurait lancé un contrat contre lui et qu'il aurait été protégé par les autorités françaises sous la présidence de Jacques Chirac[source secondaire nécessaire].
  • En , il accuse le président Nicolas Sarkozy d'avoir été élu en cachant aux Français ses liens avec les casinotiers, la banque Rothschild et la CIA. Il présente ses imputations à l’Eurasian Media Forum au Kazakhstan, puis dans un article publié par l'hebdomadaire russe Profil[52].
  • Le , Thierry Meyssan fait publier par le magazine russe Odnako un dossier où il remet en cause l'enquête de l'ONU sur l'assassinat de Rafiq Hariri, confiée par l'organisation au procureur allemand Detlev Mehlis. Meyssan présente des éléments nouveaux qui semblent impliquer l'Allemagne[53].
  • Après le massacre de l'équipe du journal Charlie Hebdo en , Thierry Meyssan affirme que « les commanditaires les plus probables [de l'attentat] sont à Washington » car de véritables djihadistes « ne se seraient pas contentés de tuer des dessinateurs athées, ils auraient d’abord détruit les archives du journal sous leurs yeux »[54]. Deux mois après les attentats, Charlie Hebdo qualifie ces arguments de « farfelus » et « loufoques »[55].

Critiques : désinformation, complotisme et propagande

Selon le ministère des Affaires étrangères américain, en 2005, Thierry Meyssan fait partie d'une liste de sources qui pratiquent une « désinformation antiaméricaine » dans le monde, et, en 2020, il est cité comme source dans un rapport sur les piliers de la désinformation et de la propagande russes[56],[57],[58].

Thierry Meyssan est considéré comme une figure majeure du conspirationnisme[9]. Un dossier intitulé L'imposture Thierry Meyssan est publié par Conspiracy Watch, un site français qui se donne comme objectif de rendre compte du conspirationnisme et des théories du complot[59]. En 2005, Arte consacre une soirée Théma aux théories du complot, où Meyssan tient le premier rôle[60],[61]. Un documentaire de Ted Anspach, intitulé Les Effroyables Imposteurs (2009, 45 minutes), dénonce les théories du complot en général et celles de Thierry Meyssan en particulier[62].

La presse française est très virulente envers Thierry Meyssan. Le , Laurent Joffrin qualifie Thierry Meyssan de négationniste dans l'Obs[63]. En 2012, L'Express qualifie Thierry Meyssan d'« assadolâtre certifié », qui « pérore sans désemparer sur les plateaux d'Al-Manar, la chaîne du Hezbollah libanais, ou de la télévision d'État syrienne, où il lui arrive d'accuser nommément tel reporter parisien de jouer les espions pour les services français ». Le journal résume à cette occasion le discours de Meyssan de « logorrhée délirante et narcissique » d'un homme dont le cas « relève au mieux de la psychanalyse »[41]. Le , l'hebdomadaire L'Express qualifie Thierry Meyssan de « maître à fausser »[64].

Thierry Meyssan est critiqué par BFM TV pour « manipulation » d'une photo montrant la rencontre entre le sénateur John McCain et, selon lui, Abou Bakr Al-Bagdadi, le chef de l'État islamique, alors que l'image montre, selon BFM TV, non pas le soi-disant chef de Daech mais un traducteur dénommé Abou, habitant la banlieue d'Alep (en fait, les interlocuteurs du sénateur américain sont cinq commandants rebelles venant de différentes régions de Syrie)[65].

En 2022, alors qu'il assiste à une réunion de propagande visant à défendre Bachar el-Assad et Vladimir Poutine à Paris, StreetPress le qualifie de « spin doctor de la propagande anti-occidentale pour le compte du régime syrien »[9].

Publications

Notes et références

Annexes

Bibliographie

Liens externes

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