Tsunesaburō Makiguchi

pédagogue japonais, fondateur avec Josei Toda du mouvement bouddhiste Soka Gakkaï
Tsunesaburō Makiguchi
Tsunesaburo Makiguchi.
Fonctions
Premier président (d)
-
Sōka gakkai
Biographie
Naissance
Décès
Sépulture
Nom dans la langue maternelle
牧口常三郎Voir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Formation
École normale n°1 de Hokkaidō (d)
Université d'éducation de HokkaidōVoir et modifier les données sur Wikidata
Activité
enseignant, auteur, leader religieux


Tsunesaburō Makiguchi (牧口 常三郎, Makiguchi Tsunesaburō?, calendrier lunaire à Arahama-mura - grégorien à Tokyo), fut le fondateur (avec Josei Toda) du mouvement bouddhiste Soka Kyoïku Gakkaï, (l’actuelle Soka Gakkaï) en 1930. Enseignant, il écrivit des manuels scolaires mais aussi des ouvrages sur la pédagogie. Emprisonné pour crime de lèse-majesté pendant la guerre,[1], il mourut de malnutrition à l'âge de 73 ans. Son parcours et sa personnalité sont à la fois vénérés par les membres de l'organisation religieuse qu'il a fondée, et l'objet de plusieurs controverses, notamment concernant leur caractère intransigeant.

Jeunesse et études

Tsunesaburō Makiguchi (1871-1944) de son vrai nom Shoïchi Watanabe, est né dans un petit village, à Arahama-mura[2], aujourd'hui Kashiwazaki, une petite ville portuaire de la côte occidentale du Japon. Cependant il a passé sa jeunesse dans l'île de Hokkaido, au nord de l'archipel, adopté par son oncle Zendayu Makiguchi, dans la ville de Otaru,. Cette dernière subissait à la fin du XIXe siècle une industrialisation rapide et servait de ville modèle pour les artisans de la modernisation du Japon au cours de l'ère Meiji. Tout en travaillant il continua à étudier. À 14 ou 15 ans il décide de se rendre à Sapporo, capitale du Hokkaido chez un de ses oncles. Makiguchi travaille comme coursier au commissariat[3] et c'est le chef de la Police qui le fait entrer à l'école normale deux ans plus tard en 1891.

Carrière

En 1890 l'orientation du système pédagogique japonais est inscrite dans la constitution de 1889, le système éducatif doit former des sujets rompus à l'obéissance et à la loyauté. "On nous parlait souvent du respect dû à l'empereur et de patriotisme." (Kotaro Ogawa, Cinquante ans d'histoire de l'Ecole Normale de Sapporo, 1936)

Makiguchi commence sa carrière en 1892 à Sapporo et conçoit une nouvelle méthode d'enseignement de la rédaction. Il devient officiellement instituteur d'école primaire en 1893. Il y enseigne pendant quelques années. Devenu membre actif de l'association locale des enseignants il publie plusieurs articles dans "la revue de l'association pour l'Education dans le Hokkaïdo" puis en devient rédacteur permanent. En 1896 il réussit le concours de recrutement des professeurs de géographie du secondaire. Il enseigne l'année suivante à l'école normale du Hokkaïdo. En 1900, il quitte le Hokkaido pour s'installer à Tokyo.

Dès 1897 il entreprend un ouvrage de géographie à l'intention des éducateurs de l'école primaire qui paraîtra en 1903: "La Géographie de la vie humaine" (Jinsei Chiraku), qui servira jusqu'à la moitié de vingtième aux enseignants préparant leur diplôme de géographie[4]. C'est "une sorte de "journal de bord" où il développe une perception holistique de la géographie qui met en relations les êtres humains et leur environnement. Il prévoyait — le désastre écologique potentiel qui guettait son pays — qui avait suivi le modèle industriel américain[4].

Pendant une dizaine d'années, Makiguchi travaille comme éditeur de périodiques pédagogiques. Il lance une institution de cours par correspondance pour les jeunes femmes n'ayant pas accès à l'éducation ni les moyens financiers nécessaires. Il enseigne également dans une école pour étudiants étrangers de Tokyo et rédige plusieurs manuels pédagogiques pour le Ministère japonais de l'éducation dont "Etude de la communauté" (Kyodoka) qui reprend un des thèmes de Jinsei Chiraku, l'importance de l'enracinement de l'individu et la disparition de la communauté. Entre 1913 et 1932, il sera proviseur de six écoles élémentaires de la capitale.

Il encourageait les enseignants à étudier sans relâche, à développer une méthode empirique basée sur leur bon sens et leur expérience personnelle à l'écoute des enfants. Lui-même se montrait soucieux de chaque élève et de ses difficultés, il "défendait le droit des enfants à apprendre en tant qu'enfants, en laissant libre cours à leur curiosité et à leurs inclinations naturelles, et à un rythme convenant à leur âge"[5] . Ses méthodes vont à l'encontre de celles préconisées officiellement. Selon la Soka Gakkaï il a été nommé en 1922 à Shirokane où il réforme l'association des parents d'éléves, organise des réunions hebdomadaires, invite des intervenants extérieurs, invente et expérimente de nouvelles méthodes pédagogiques. Il y fut révoqué comme il l'avait déjà été quatre fois auparavant[5].

Soka Kyoiku Gakkaï

Jōsei Toda

Joseï Toda l'ami de Makiguchi, et son disciple. "En quête d'un principe religieux qu'il ne ressentirait pas comme une atteinte à son intégrité", Makiguchi dont les parents étaient affiliés au Temple Zen et les parents adoptifs au Temple Nichiren, influencé par des relations chrétiennes, en contact avec les socialistes pendant une période, ne se satisfaisait pas non plus de la morale proposée par le confucianisme très en vogue, ni de l'interprétation nationaliste de Tanaka des enseignements de Nichiren. C'est la rencontre en 1928 avec Sokei Mitani, un autre enseignant, qui l'amena à se convertir avec Joseï Toda au bouddhisme de la Nichiren Shoshu[6].

Pédagogie de la création des valeurs

En 1930 Makiguchi écrit avec Joseï Toda le premier volume de Sōka Kyōikugaku Taikei (Pédagogie de la Création des Valeurs). Le de la même année, il crée avec Jōsei Toda la Soka Kyoïku Gakkai, (première appellation de la Soka Gakkaï). Société (association) pour une pédagogie créatrice de valeurs. La sortie des quatre volumes de son livre (1930, 1931, 1932, 1934) sera l'occasion pour Makiguchi de donner des conférences dans tout le Japon.

Dans le deuxième volume apparaît sa théorie: « Le but suprême et ultime de la vie est le bonheur, c’est-à-dire la création de valeurs : le bonheur caractérise l’existence de celui qui peut pleinement obtenir et créer des valeurs ». Valeurs qu'il définissait par Beauté, Gain (ou Bienfait), Bonté. La Soka Gakkaï reprenant l'analyse de Noah Brannen explique: « La théorie de Makiguchi se veut une rectification de l'erreur transmise par la tradition platonicienne/.../ en substituant à la vérité, le bienfait. La raison en est que "vérité" et "valeur" sont des concepts entièrement différents. La vérité révèle ce qui est, la valeur dénote une relation entre un sujet et un objet. La valeur relie l'objet à l'homme. La vérité dit : "Ceci est un cheval", la valeur dit : "Le cheval est beau" ». Selon Karel Dobelaere, penseur belge proche de la Soka Gakkaï, ce livre apporte "une nouvelle hiérarchie des valeurs, la bonté va supplanter l'utilité"[7]. Sous la double influence des travaux de Durkheim et du Bouddhisme de Nichiren, Makiguchi pensait faire passer ses théories par l'éducation mais l'adoption par le gouvernement Meiji des écrits impériaux sur l'éducation lui fait comprendre l'impossibilité de les mettre en action.

Jusqu'à la seconde guerre mondiale Makiguchi va approfondir sa connaissance du bouddhisme de Nichiren aux côtés du révérend Horigome, futur 65ème Grand Patriarche de la Nichiren Shoshu sous le nom de Nichijun.

Opposition

En 1939 le régime militariste japonais impose à tous les courants religieux de se regrouper sous la bannière du shintoïsme d'état. La Nichiren Shoshu accepte l'amulette shinto, signe d’allégeance au culte de l'empereur, Makiguchi et ses disciples dont Joseï Toda la refusent. En 1943 Ils sont incarcérés, Tsunaburaro Makiguchi décède le à la suite des interrogatoires et de la malnutrition. Il a 73 ans.

Héritage

Son influence s'est limitée au Brésil, où sa méthode a été mise en place dans un petit nombre d'écoles (55)[8] ; au Japon, où sur la base de sa pédagogie, Daisaku Ikeda a créé un réseau d'enseignement laïque depuis l'école jusqu'à l'université, et aux États-Unis, où a été fondée (2001) l'Université Soka d'Amérique (SUA), avec pour vocation la formation de "citoyens du monde engagés à contribuer à la société sur les bases de valeurs humanistes"[9].

Des trois maîtres fondateurs à qui les pratiquants dédient chaque jour l'une de leurs prières silencieuses, Tsunesaburo Makiguchi est considéré comme celui qui par les thèmes qu'il a abordés : l'environnement, la communauté et l'éducation[4] a défini les orientations pratiques de la Soka Gakkaï. Il est aussi celui qui par son "radicalisme" avec son refus de l’amulette shinto (talisman d'Ise) au nom de la liberté religieuse et sa volonté de transmettre le bouddhisme en définit l'état d'esprit[10].

Notes et références

Voir aussi

Bibliographie

  • Dayle M. Bethel, Makiguchi, le créateur de valeurs, Éditions du Rocher, 1996

Liens externes

Travaux de chercheurs

  • (en) Brian Daizen Victoria, Senior Lecturer Centre for Asian Studies, University of Adelaide, Engaged Buddhism: A Skeleton in the Closet? [1]
  • Elkevizth Brian Henry - From “Education Beyond Utility” to Utility for Legitimacy - Contemporary Opposition to Article 9 Revision in the Context of the Sōka Gakkai's Historical Development (2012)
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