Prosélytisme

fait de susciter l'adhésion d'une personne à une doctrine religieuse
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Le prosélytisme est l'attitude de personnes cherchant à convertir d'autres personnes à leur foi. Par extension, le prosélytisme désigne le zèle déployé afin de rallier des personnes à un dogme, une cause, une théorie ou doctrine, parfois en imposant des convictions[1]. Le « nouveau converti » est dit prosélyte (du latin ecclésiastique proselytus, et du grec προσήλυτος / prosêlutos, « nouveau venu [dans un pays] »).

Hôpital de la mission prosélyte anglaise pour la « promotion du christianisme auprès des Juifs », fondée en 1843, Jérusalem.

Par l'influence du sens du terme « prosélytisme », un glissement s'est produit dans l'usage du terme « prosélyte » qui, dans l'usage ordinaire, notamment des médias, désigne aussi bien un membre ancien qui fait du prosélytisme, qu'un nouveau venu dans le groupe. Le champ d'emploi s'est aussi élargi, permettant qu'on parle de prosélytisme laïque, révolutionnaire (comme chez Robespierre par exemple[2]) ou athée (comme chez l'encyclopédiste et académicien le Baron d'Holbach[3]).

Au début du XXIe siècle, le terme a souvent une connotation négative dans le débat sur les sectes, ou lorsqu'il se réfère à des mouvements politiques ou des activités religieuses.

Origines du terme et du concept

Le prosélytisme des origines est lié à la conversion religieuse, c'est dans cette dernière acception qu'il s'est répandu, grâce au grec de la Septante[réf. nécessaire]. Le terme, en latin, n'a que le sens religieux ; il est un des sens possibles en français. Le dictionnaire historique de la langue française d'Alain Rey signale que le mot a été introduit en français comme antiquité hébraïque, et que dès le XVe siècle, le mot « prosélyte » se dit d'une personne récemment gagnée à une cause. Par extension, ce mot s’applique en dehors du champ de la religion et de la spiritualité pour parler du zèle déployé pour convertir quelqu’un à ses idées.

Le terme « prosélyte » est utilisé dans le Nouveau Testament. Matthieu 23, 15 : « Malheur à vous, scribes et pharisiens hypocrites ! parce que vous courez la mer et la terre pour faire un prosélyte ; et, quand il l'est devenu, vous en faites un fils de la géhenne deux fois plus que vous. » Et aussi Jean 12, 20 ; Actes 2, 10 au sujet de la Pentecôte : « Et comment les entendons-nous dans notre propre langue à chacun, dans notre langue maternelle ? Parthes, Mèdes, Élamites, (…), et ceux qui sont venus de Rome, Juifs et prosélytes… » ; Actes 6, 5 ; 13, 43.

Dans l'islam, le prosélytisme est appelé Da'wa, qui invite les non-musulmans à écouter le message du Coran.

Dans l'histoire

Chapelle de l'Institut pour les convertis juifs de la London Society pour la promotion du christianisme parmi les Juifs à Varsovie, 1846.

L'histoire des sciences sociales et des religions montre que les civilisations ont connu de nombreux épisodes de prosélytismes, religieux, confessionnels et/ou idéologiques notamment. Ils sont sources de tensions politiques et communautaires[4] et parfois de conflits armés, dont certains qualifiés de « guerre sainte ».

Le missionnaire H. A. Stern (en) prêchant les Beta Israel en Ethiopie, 1862.

Après les grandes conquêtes, colonisations et le prosélytisme des missionnaires et de leurs missions, de nouveaux moyens sont apparus, parfois inspirés de la propagande et de la manipulation mentale et s'appuyant sur la presse, puis la radio, la télévision et le cinéma et enfin sur l'Internet et les réseaux sociaux voire dans des lieux particuliers comme les écoles, les casernes ou les prisons.

Le prosélytisme entretient des relations parfois complexes vis-à-vis du droit[5],[6] et de la liberté d'expression[7] en s'opposant souvent plus ou moins ouvertement au pluralisme et à la liberté religieuse[8]. Il dérive parfois vers le harcèlement.

Controverses récentes

En mai 2008, des militaires américains en Afghanistan ont confisqué et brûlé des bibles dans la base aérienne de Bagram. L'année suivante, Al Jazeera révéla en effet que l'aumônier militaire en chef, le lieutenant-colonel Gary Hensley, avait alors prôné la conversion de la population et distribuait des bibles en dari et pachtou envoyées par une église américaine[9],[10],[11],[12].

Le 30 août 2010, le chef d'État libyen Mouammar Kadhafi distribue des corans lors d'une visite officielle en Italie et déclare que « l'Islam doit devenir la religion de toute l'Europe »[13].

Le 16 novembre 2018 sur l'île de North Sentinel, un Américain, John Allen Chau, tenta d'évangéliser les Sentinelles, pourtant connues comme particulièrement hostiles envers les étrangers. Il fut alors encerclé et tué par la tribu.

Législations

En France, les élèves ne doivent pas être soumis au prosélytisme. La pratique du prosélytisme y est également interdite par la loi[14].

En 2000, le Conseil d'État a jugé que « un agent du service de l'enseignement public, [qui] manifeste dans l'exercice de ses fonctions, ses croyances religieuses, constitue un manquement à ses obligations »[15].

En 2016, l'article L. 1321-2-1 de la loi Travail dispose que « le règlement intérieur [d'une entreprise] peut contenir des dispositions restreignant la manifestation des convictions des salariés »[16].

La circulaire du 15 mars 2017 du ministère de la Fonction publique dispose que : « Le fonctionnaire exerce ses fonctions dans le respect du principe de laïcité. À ce titre, il s'abstient notamment de manifester, dans l'exercice de ses fonctions, ses opinions religieuses »[17], interdisant de fait tout prosélytisme.

Notes et références

Voir aussi

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Bibliographie

  • Philippe Greiner, L'encadrement juridique du prosélytisme en droits grec, français, européen (1950) et en droit canonique catholique romain, 2005, 590 p. (thèse)
  • Philippe Greiner, « Genèse de la laïcité et prohibition du prosélytisme », Transversalités, 108, octobre-décembre 2008, p. 21-37. Transversalités est la revue (de niveau universitaire) de l'Institut catholique de Paris.
  • Philippe Greiner, « Typologie des prosélytismes », Transversalités, 97, 2006 p. 91-126.
  • Philippe Greiner, « Activités d’évangélisation de l’Église catholique et prosélytismes », L’année canonique, t. XLVII, 2005, p. 119-144.

Articles connexes

Liens externes

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