Titré à sa naissance « Son Altesse Impériale le prince impérial Naruhito de Hiro » (浩宮徳仁親王, Hiro-no-miya Naruhito shinnō?), il devient l'héritier du trône du chrysanthème à la mort de son grand-père, l'empereur Hirohito, le , et prend alors le titre de « Son Altesse Impériale le prince héritier Naruhito » (皇太子徳仁親王, Kōtaishi Naruhito Shinnō?). Devenu empereur du Japon après l'abdication de son père Akihito, son avènement au trône marque le début de l'ère Reiwa et il n'est plus connu au Japon que comme « Sa Majesté l'Empereur » (天皇 陛下, Tennō Heika?) ou encore comme « Sa Majesté présente » (今上 陛下, Kinjō Heika?). Si en Occident s'est répandu l'usage de nommer l'empereur par son simple prénom, Naruhito, à l'instar des monarques européens, cette pratique est considérée au Japon comme un manque de respect à l'empereur.
Comme tous les membres de la famille impériale, le jeune prince reçoit le septième jour après sa naissance, soit le , un prénom et un nom de complaisance. Le même jour, il reçoit également de sa mère un emblème personnel (お印, o-shirushi?) censé symboliser son caractère : le catalpa chinois(梓, Azusa?).
Son prénom, Naruhito(徳仁?), et son nom, Hiro-no-miya(浩宮?), sont issus, comme le veut la tradition dans la maison impériale du Japon, d'un passage de l'un des Classiques chinois, à savoir de la 32e sentence de la Doctrine du Milieu de Confucius selon Zi Si, qui dit, en parlant de celui qui réussit à atteindre le degré ultime d'humanité en trouvant le lien entre terre et ciel : « 浩浩其天!茍不固聰明聖知達天德者,其孰能知之 », ce qui, traduit du chinois, signifie : « Appelle-le ciel, tellement il est vaste ! Qui peut comprendre cela, si ce n'est celui qui est rapide en appréhension, clair dans son discernement, d'une intelligence largement hors de portée et d'une connaissance universelle, possédant toute la vertu céleste[1],[2] ? ».
Les kanji浩 (kō, hiro, ōki?, « grand, nombreux, vaste, abondant »)[3] et 德 (toku, oshie, naru-?, « éthique, moralité, puissance, vertu »)[4] renvoyant ainsi à deux qualités reliant l'homme au ciel.
Il est, avec son frère et sa sœur, le premier enfant d'un empereur à avoir été élevé directement par son père et sa mère, la tradition jusqu'à présent voulant que les enfants de la famille impériale fussent séparés très tôt de leurs parents pour être éduqués par des chambellans du palais et par des précepteurs privés.
Études et travaux de chercheur en histoire et sur la gestion de l'eaumodifier le code
Malgré ses obligations officielles, il a continué ses activités de recherche en histoire médiévale du Japon et de l'Angleterre, étant spécialisé notamment dans l'étude des transports fluviaux et de la mise en valeur par ces deux pays de leurs voies navigables à travers le passé. Il est en effet chercheur honoraire aux archives de l'université Gakushūin depuis 1992, il a donné également plusieurs séries de cours et de conférences universitaires dans cet établissement en 2003 (conférences au Collège féminin sur la « Société et culture britannique : source de la culture nord-américaine »), 2005, 2006 et 2008.
S'il devient, dans la pratique, l'héritier au trône du Japon après le décès de son grand-père et l'avènement de son père le , il n'est investi officiellement comme prince héritier(皇太子, Kōtaishi?) que le , jour de son 31e anniversaire, lors de la cérémonie traditionnelle Rit'taishi-no-Rei(立太子の礼?, litt. « Cérémonie d'avènement du Premier fils »).
Son statut lui donne un nombre important de responsabilités cérémonielles et symboliques ainsi que représentatives, comme l'attestent de nombreux voyages officiels dans des pays étrangers. Il a ainsi jusqu'à présent visité une vingtaine d'États, étant délégué notamment pour représenter la maison impériale et le Japon lors de cérémonies au sein des différentes familles régnantes dans le monde (comme un sacre ou un couronnement, ou encore un mariage princier). Il est aussi président honoraire de l'Année d'échanges Japon-Brésil en 2008, chargé notamment d'assister aux commémorations du centenaire de l'immigration japonaise au Brésil le .
Sur le plan caritatif et humanitaire, il est vice-président d'honneur de la Croix-Rouge japonaise[5] depuis . Chercheur en histoire des transports fluviaux, il s'est également personnellement impliqué dans le domaine de la lutte pour l'approvisionnement en eau et contre la sécheresse dans le monde, et a ainsi été président honoraire du Troisième Forum mondial de l'eau qui s'est tenu au Japon (à Kyoto, Osaka et Shiga) du 16 au , où il fait notamment une intervention remarquée lors de la journée d'ouverture sur « les cours d'eau reliant Kyoto et sa région ». Lors de l'ouverture du forum suivant, le à Mexico, il est chargé à nouveau de faire un discours cette fois-ci consacré à « Edo et la navigation », et réalise la conférence d'ouverture du 1er Sommet Asie-Pacifique sur l'eau en sur « les Humains et l'eau : du Japon à la région Asie-Pacifique ». Il est enfin nommé en président honoraire du Bureau consultatif sur l'eau et la salubrité du Secrétaire général des Nations unies.
Naruhito aurait rencontré sa future épouse, Masako Owada, diplomate non issue de l'aristocratie, lors d'une réception organisée en 1986 à la résidence de son père, Akihito, qui n'était encore que prince héritier[6].
Le mariage est finalement accepté par le Conseil de la maison impériale le , les fiançailles ont lieu le 12 avril suivant et le mariage le .
Ensemble, ils ont eu une fille le , la princesse impériale Aiko de Toshi. Avant son accession au Trône, il réside, avec son épouse et sa fille, dans la résidence officielle du prince héritier, le palais du Tōgū, situé dans le complexe palatial du domaine d'Akasaka dans l'arrondissement spécial de Minato à Tōkyō, où il est né et a grandi.
La loi de succession au trône écartant actuellement les femmes, une révision était envisagée par le gouvernement pour permettre à sa fille unique de devenir un jour impératrice régnante[7]. Néanmoins, depuis l'annonce en de la grossesse de l'épouse du prince Akishino, frère de Naruhito (déjà parents de deux filles), cette révision a été abandonnée puisque la princesse Kiko a donné naissance à un garçon, le prince Hisahito, le .
Toutefois, l'abandon de ce projet ne peut être que provisoire selon plusieurs spécialistes du droit constitutionnel et de la maison impériale, dont le juriste Kōichi Yokota, car « il n'y a aucune garantie de continuité pour la famille impériale tant que des règles souples de succession n'auront pas été adoptées ». Les concubines ayant disparu et l'ancien clan impérial ayant été réduit à une branche, la pérennité du trône du chrysanthème ne repose aujourd'hui que sur quelques couples, et ce nombre devrait se réduire pour la génération suivante puisque actuellement, l'empereur n'a qu'une fille et un seul neveu successible (ainsi que deux nièces), tandis que la seule branche cadette de la famille impériale, celle des Mikasa, n'a engendré également que des filles. Ainsi la famille impériale devrait, si les choses restent en l'état, se limiter à terme aux seuls descendants du jeune prince Hisahito d'Akishino, et à sa capacité à avoir à son tour un fils[8].
Le système patrilinéaire ne pouvait parfaitement fonctionner que grâce à la polygamie, qui a disparu de fait avec l'empereur Taishō (1879-1926) et de droit avec la constitution de 1947, qui dispose que l'héritier doit être « légitime ». Par ailleurs, la réforme de 1947 a limité la transmission du trône aux descendants de Taishō, radiant de la famille impériale, donc des successeurs possibles, de nombreuses branches collatérales. La monarchie nippone subit en outre la pression d'une majorité de Japonais désireux de modernité et favorables à l'avènement un jour de la princesse Aiko comme Impératrice régnante[9].
Le couple princier a dû faire face également aux dépressions chroniques subies par la princesse Masako en raison des fortes pressions médiatiques et protocolaires exercées sur cette dernière, Naruhito sortant à plusieurs reprises de sa réserve pour défendre son épouse. Il s'en prend ainsi directement à l'Agence impériale, qui gère l'agenda des membres de la famille régnante, en , lorsque celle-ci décide de ne pas autoriser la princesse, qui est alors très faible, à l'accompagner lors d'un déplacement officiel aux Pays-Bas, déclarant alors : « La princesse Masako, après avoir abandonné son travail de diplomate pour entrer dans la maison impériale, a été grandement affectée d'apprendre qu'elle n'était pas autorisée à voyager à l'étranger pour un long moment [...] Il y a eu des événements qui ont été à l'encontre de la carrière et de la personnalité de la princesse Masako[10] ». Plus tard, le , il demande de considérer le cas de son épouse avec compassion : « Je voudrais que (le public) comprenne que Masako continue à faire les plus grands efforts avec l'aide de ses proches [...] S'il vous plaît, continuez à la considérer avec gentillesse et sur le long terme[11] ».
Le 19mai2017, le gouvernement conservateur japonais approuve un projet de loi spéciale autorisant son père, l'empereur Akihito à renoncer au trône pour la fin de l'année 2018. Cette loi ne s'applique néanmoins qu'à lui seul et ne bénéficie pas à ses successeurs[12]. Le Parlement vote définitivement la loi le 9juin2017, pour une abdication et une succession dans les trois ans à venir[13]. Le 1erdécembre2017, le gouvernement annonce que l'empereur abdiquera le et Naruhito sera officiellement intronisé le lendemain, soit le . Le Japon entre alors dans l'ère Reiwa.
Le , le lendemain de l'abdication de son père, Naruhito entre officiellement en fonction au cours de deux courtes cérémonies marquant le début du protocole de l'accession au Trône (即位の礼, Sokui-no-rei?) dans la « Salle des Pins » ou « salle du Trône » (松の間, Matsu-no-ma?) du « Hall d'État » (正殿, Seiden?) du Palais impérial(皇居, Kōkyo?). La première, la cérémonie traditionnelle shintō du Kenji-tō-shōkei no gi(剣璽等承継の儀?, litt. Cérémonie de transmission des insignes impériaux), se fait en présence des seuls hommes adultes de la succession au Trône (le prince héritier Fumihito et le prince Masahito de Hitachi), du Premier ministreShinzō Abe, des membres du Cabinet du Japon (dont la première femme à assister à une telle cérémonie, la ministre Satsuki Katayama), du juge en chef de la Cour suprême, des présidents des deux chambres de la Diète et des chambellans de l'Agence impériale. Il lui est alors présenté les insignes impériaux(剣璽, Kenji?), dont deux des trois trésors sacrés du Japon(三種の神器, Sanshu no Jingi?), à savoir l'épée de Kusanagi(草薙の剣, Kusanagi-no-tsurugi?), qui selon la tradition aurait été celle utilisée par la déesse Amaterasu, ancêtre légendaire de la famille impériale, pour chasser les démons de l'archipel, et qui symbolise la valeur de l'empereur ; et le magatama de Yasakani(八尺瓊曲玉, Yasakani no magatama?), qui représente la bienveillance et la faculté d'apprendre du monarque. Le nouvel empereur reçoit alors également le sceau impérial du Japon ou « Noble insigne du chrysanthème » (菊の御紋, Kiku-no-gomon?), véritable emblème national du Japon même s'il n'a plus de rôle officiel depuis 1947, et le sceau d'État du Japon ou « sceau du pays » (国璽, Kokuji?), sceau officiel de l'État japonais qui doit lui servir à sceller les documents soumis par le Cabinet[15],[16].
Puis, la seconde cérémonie, plus laïque et plus ouverte, avec à ses côtés son épouse la nouvelle impératriceMasako et en présence des femmes de la famille impériale et des corps constitués du Japon, suit immédiatement la première : il s'agit du Sokui-go-chōken no gi(即位後朝見の儀?, litt. cérémonie de l'audience d'après l'accession au Trône). L'empereur y a fait son discours inaugural de nouveau « symbole de l'État et de l'unité du peuple japonais », s'inscrivant alors dans la continuité de l'exercice de la fonction initiée par son père en déclarant : « Je m'engage à agir conformément à la Constitution et à remplir mes obligations de symbole de l'État et de l'unité du peuple, en ayant toujours le peuple à l'esprit et en me tenant toujours à son côté ». Le couple impérial clôt cette journée d'investiture par une rencontre avec les fonctionnaires de l'Agence impériale et par une visite à l'empereur et impératrice émérites, Akihito et Michiko, dans leur nouvelle résidence temporaire de Takanawa[17],[18]. Ils font leur première apparition publique le 4 mai suivant, se montrant six fois dans la journée au balcon du Palais impérial pour saluer la foule.
Son avènement est rituellement proclamé lors de la Cérémonie d'intronisation au Hall d'État (即位礼正殿の儀, Sokuirei-Seiden no gi?), le [19].Celle-ci reprend le rituel modifié qui avait été adopté le pour le précédent empereur : au lieu de se tenir au palais de Kyoto comme c'était le cas avant la Seconde Guerre mondiale, elle a lieu dans la « salle des Pins » du « hall d'État » du Kōkyo ; la plupart des symboles shinto qu'elle comportait sont enlevés du rituel ; elle se fait en présence d'étrangers, avec des délégués représentant près de 200 pays en plus des invités japonais ; le Premier ministre s'adresse directement à l'empereur en se tenant en face de lui, et non plus, comme c'était le cas dans le passé, depuis la cour du palais, afin de démontrer que le régime du Japon est désormais démocratique et que donc le Cabinet n'est plus subordonné au monarque. Cette cérémonie est complétée, en par un rite cette fois-ci totalement shinto et secret pendant lequel l'empereur remercie les kami pour son avènement en leur offrant du riz sacré : la « cérémonie du grand Remerciement » (大嘗祭の儀, Daijōsai no gi?). Le coût de ces manifestations, et le fait que de l'argent public soit utilisé pour financer des manifestations au caractère fortement religieux, a suscité des critiques, notamment de la part d'associations ou partis de la gauche japonaise, comme cela avait déjà été le cas pour le précédent avènement impérial (le gouvernement japonais ayant dépensé 2,7 milliards de yens soit vingt-quatre millions de dollars américains pour organiser l'évènement)[20].
Le , les festivités publiques de son 60e anniversaire sont annulées en raison de la pandémie de Covid-19 qui frappe le monde. Le 19 mars suivant, toujours en raison de la pandémie, sa visite d'État au Royaume-Uni prévue au printemps 2020 est reportée par la reine Élisabeth II, mais aucune date n'a été donnée à l'heure actuelle quant à ce report [21],[22].
Le 19 septembre 2022, l’Empereur est présent aux funérailles d’État de la reine du Royaume-UniÉlisabeth II, à Londres, aux côtés de son épouse. Il s’agit du premier déplacement à l’étranger du couple impérial depuis l’avènement de Naruhito[24].
La fille unique de l’Empereur, la princesse Aiko de Toshi, ne pourra pas succéder à son père en vertu de la loi empêchant les femmes de régner. Ainsi, après la mort de Naruhito, c’est son frère le prince héritier Fumihito qui lui succèdera sur le trône du Chrysanthème. Ensuite viendra le tour du prince Hisahito.
Une nouvelle ère a commencé le jour de son avènement, le à 0h00, dont le nom a été choisi par le Cabinet du Japon (comme cela avait été le cas pour l'ère précédente, Heisei) et officiellement présenté au public le : Reiwa, officiellement traduit par « belle harmonie ». Contrairement à la tradition, qui voulait que ce nom soit issu de passages des Classiques chinois, il s'agit ici, pour la première fois, de la reprise d'un texte japonais, un waka, court poème japonais, de l'anthologie Man'yōshū[25], datée de 730[26],[27]. Le kanjiwa(和?) représente l'harmonie, tandis que rei(令?) peut être traduit par porteur d'espérance, vénérable, ordre, bien, beau, agréable[25],[28]. La traduction française du waka ainsi utilisé donne[29] : « Voici le beau (rei) mois du début de printemps, l'air est doux et la brise légère (wa), le prunier a déployé ses fleurs blanches comme poudre d’une belle à son miroir, l’orchidée répand une odeur suave comme poche à parfums. »
Le prince héritier puis empereur du Japon pratique, en dehors de ses activités officielles et de recherche, de nombreuses activités sportives en amateur, notamment le tennis, l'alpinisme et le jogging.
Comme ses parents, c'est un grand amateur de musique qui joue depuis l'enfance du violon, la famille impériale ayant formé à plusieurs reprises un trio familial, le prince héritier puis empereur Akihito jouant du violoncelle, la princesse puis impératrice Michiko du piano, et le prince puis prince héritier Naruhito du violon.
Après son entrée à l'université et l'intégration de l'orchestre qui y est associé, Naruhito change d'instrument de musique et se met à l'alto, instrument qu'il pratique depuis lors[30].
- : Son Altesse Impériale le prince impérial Naruhito de Hiro
– : Son Altesse Impériale le prince héritier du Japon
- présent : Sa Majesté Impériale l'empereur du Japon
Aucun nom n'est généralement attaché au titre de l'empereur. Celui-ci ne reçoit son nom d'empereur (帝号, Teigō?), qui reprend l'appellation de l'ère (時代, Jidai?) correspondant à son règne, qu'après sa mort : suivi des kanji 天皇 (Tennō), il forme alors le titre posthume traditionnel (漢風の諡号, Kanfu-no-shigō?). C'est ainsi que l'ancien empereur Hirohito une fois mort a pris le nom d'empereur Shōwa (昭和天皇, Shōwa Tennō?).